samedi 1 juillet 2017

Grand Concours International de "Doubles de Clément Rosset" : 1000 champions ex-aequo !







Parrainé par La Main de Singe, le premier Grand Concours International de Doubles de Clément Rosset (édition 2017) s'est déroulé cette semaine au Néo-Mexique. Le philosophe participait paraît-il lui-même, incognito, à cette compétition et comme à son ordinaire se montra d'une telle discrétion et d'une telle modestie qu'il ne se distingua jamais du lot ni ne se fit remarquer plus qu'un autre. Nul ne peut affirmer qu'il était présent, mais nul ne peut non plus affirmer le contraire. 

Rappelons qu'il ne s'agissait pas d'un simple championnat de vulgaires sosies. Les candidats devaient certes non seulement ressembler un minimum à Clément Rosset, mais, d'autre part, connaître un maximum ses ouvrages et sa philosophie, à savoir aussi bien sinon mieux que lui, au point qu'on pourrait croire qu'ils en sont l'auteur lui-même. Le critère majeur était que l'on puisse être vraiment pris pour Clément Rosset, tout en ne se prenant pas soi-même pour Clément Rosset. Rude challenge, qui excluait tous les farceurs, tous les imitateurs, tous les dingues, tous les sosies, dont certains peuvent certes ressembler à Clément Rosset plus que le philosophe lui-même, mais ouvrent-ils la bouche de leur tête si troublante qu'on peut voir illico qu'elle n'est pas équipée d'un cerveau adéquat.

Ce Concours se déroulait à guichets fermés, dans les salons du Mateo, le plus luxueux hôtel du Néo-Mexique. Il a attiré, du monde entier,  un millier de compétiteurs répondant à tous les critères énumérés plus haut. Ce nombre faramineux a donné lieu à un fort comique imbroglio qui restera dans les mémoires et même dans la légende locale. Le Néo-Mexique se souviendra longtemps de ce jour incroyable : enfin il se passait quelque chose au Néo-Mexique, et quelque chose de pas commun, un phénomène unique au monde.

En effet, la quasi totalité des indigènes néo-mexicains se sont précipités aux Urgences Psychiatriques, tous terrifiés d'avoir vu le philosophe français tant de fois de suite et aux quatre coins de la ville à la fois que, de deux choses l'une, soit celui-ci était vraiment doué du fantastique don d'ubiquité, soit ils étaient devenus dingos. Le Concours étant privé et n'ayant pas connu de publicité, on ignorait sa tenue.

D'ordinaire, quand Clément Rosset passe ses vacances, comme depuis des dizaines d'années, au Néo-Mexique, il est d'une telle discrétion, reclus dans sa petite maison de la montagne, que nul, alors, ne peut assurer qu'il soit bien présent sur l'ile. 

Cette soudaine pullulation d'apparitions du philosophe a de fait donné la berlue aux locaux. Non seulement tout le monde affirmait l'avoir aperçu, mais chacun certifiait même l'avoir croisé plusieurs fois de suite : ils le croyaient derrière eux et voilà qu'il était maintenant à nouveau devant eux, et un plus loin ils retombaient encore sur lui, etc… On le remarquait en terrasse sirotant du vin frais et voilà qu'il était au même moment sur le trottoir d'en face en train d'essayer un tuba, un masque et des palmes au grand Bazar. Un taxiteur qui le transportait faillit avoir un accident quand un autre taxi transportant lui aussi le philosophe le doubla, lequel, effaré à son tour, croisa d'autre taxis transportant tous le même client que lui et tous ces professionnels pourtant doués d'une vue parfaite n'en crurent pas leurs yeux. Chacun de ces malicieux passagers, interrogés par les taxiteurs, confirma qu'il était bien, lui, le seul et unique Clément Rosset en personne.

Tandis que le Concours battait son plein, tous les indigènes faisaient, eux, la queue devant les Urgences, où aucun psy n'était en mesure de les recevoir. Et pour cause ! : ces professionnels de la dinguerie avaient eux-mêmes croisé cent fois de suite Clément Rosset et doutaient désormais sérieusement de leur propre santé mentale. Ils faisaient donc discrètement la queue avec ceux qui venaient les consulter.

Le règlement de ce concours original stipulant que seuls gagneront les perdants puisqu'un aficionado convaincu de Clément Rosset ne saurait se revendiquer le double parfait du philosophe bien qu'il lui ressemble jusqu'à la confusion, tous les candidats ont été recâlés et de fait sacrés champions ex-aequo et se sont congratulés joyeusement comme un seul homme avant de trinquer en l'honneur du natif de Carteret. 

Chacun s'est vu remettre comme médaille un authentique camembert normand très coulant, de marque La Force Majeure, et a eu bien du mal à le porter autour du cou sans saloper sa chemise, mais tous ces champions étant de joyeux tempérament, aucun d'entre eux n'en a fait un fromage. On s'abreuva énormément, on mangea tout aussi démesurément et on dansa la jota jusqu'à la transe dans les rues.

J'en profite pour annoncer le lancement de deux autres compétitions internationales parrainées par La Main de singe : le Concours International d'Imitateurs de Thomas Bernhard (qui se déroulera l'an prochain à Gmunden), et le Concours International de Réincarnation de Samuel Beckett (qui se tiendra à Ussy, avec comme bonus un cruel Stock-Car de 2CV). On peut d'ores et déjà s'inscrire à nos bureaux.
L. W.-O.





8 commentaires:

Le Marquis de l'Orée a dit…

Génial.

Louis Watt-Owen a dit…

Merci de cette attention cher Marquis, venant d'un connaisseur en très casse-gueule matière rossettienne !
Comme vous êtes fort chic, je vous téléporte à l'instant dans un mail une chouette chèvre animée. Elle sera mieux chez vous, qui recueillez ces bondissantes bestioles, que chez moi, spécialisé dans l'ours, le singe et le bigfoot.
Hasta pronto !
L. W.-O.

maggam a dit…


Je suis illico d'accord pour Thomas Bernard, j'ai un peu sa tronche mais j'ai horreur de la langue allemande. C'est sûr qu'avec Beckett ça aurait été plus simple, muet et anglophile, là c'est mon domaine...

Dominique Hasselmann a dit…

Même le peintre Rossetti avait essayé de se glisser dans le concours, mais les taches de couleur multiples sur sa chemise et sur sa figure l'avaient fait remarquer. Il fut expulsé manu militari et jura que plus jamais il ne confondrait Rosset avec rousseur...

(extra, votre texte !)

Anonyme a dit…

Salut.
Je souhaitais partager une petite archive rossetienne mais je n'arrive pas à pposter de photos dans les commentaires. C'est possible ou je suis trop nul ?
FF

fitzgeraldcollinsfischer a dit…

Désolé pour le contretemps. Voici mon "archive". J'espère que l'image n'est pas trop floue. Merci



http://lefuturblogdefitzgeraldcollinsfischer.blogspot.fr


Fitzgerald Collins Fischer

Louis Watt-Owen a dit…

Cher inconnu,

Merci pour l'initiative de cette archive rossetienne et de son partage via La Main de singe, assurément l'un des exceptionnels sites où il ne se dit pas tout à fait n'importe quoi à propos du natif de Carteret.

Vous nous révélez là en quelque sorte une Généalogie d'un homme sans morale.

Votre blog, par ce premier et unique "billet", s'avère de fait singulier, et par là même fort rossetien.
Il serait dommage qu'il s'arrête-là après un tel départ.

Encore merci de ce signe et de cette attention.
Désolé de ne pas y avoir répondu plus tôt, mais j'arrive tout juste d'un voyage loin de la cybernétique.
L. WATT-OWEN

fitzgeraldcollinsfischer a dit…

Cher L.W-O
Je suis tout ému et fier de votre commentaire qui m'a bien fait rire. Il n'y a en effet qu'ici que je pouvais partager ma pépite. Je n'ai créé mon blog que par l'incapacité susmentionnée. Il restera donc singulièrement idiotement et éternellement bloqué à cette entrée seule. Cela dit je verrais bien le document atterrir un jour ou l'autre dans le futur album de la Pléiade, dirigé par Mms Delon et Espinosa prévu pour 2039 (interception wikileaks ultra confidentielle chut). En attendant, les pélerinages rue de la Faisanderie sont ouverts.
Bien à vous. Salut à tous les amis de LMDS.
FF