mercredi 14 décembre 2011

"Je dirai que je suis tombé…"



Video ci-dessus : Roland Dubillard avec Pierre Dumayet, le 28 novembre 1962.
Gaffe : Dubillard n'entre en scène qu'à la 34ème minute.


Dubillard est mort.
Ah Merdre !

"On n’a qu’à regarder ses deux mains pour se rendre compte que l’esprit de contradiction est tout de même capable d’obtenir de beaux résultats." 

"Jouer la comédie pour quelqu'un, c'est essayer de lui faire comprendre qu'il n'est pas là."


« Dans la nuit j’ai construit ma nuit,
j’ai couché mon ombre avec l’ombre.
Le plaisir a pris mon plaisir.
Mon souffle m’a donné au vent. »



Roland Dubillard


Dans Le Figaro (une fois n'est pas coutume !) :
Le récit d'une rencontre avec Dubillard, chez lui, en 2004

Une galerie de portraits de Dubillard acteur sublime

dimanche 11 décembre 2011

Tête en l'air

La promenade d'André Dhôtel, par L. Watt-Owen, Canal de Rilly, Ardennes, 2009 / click to enlarge

La route de Rethel, Ardennes, par L. Watt-Owen ©, 2009 / click to enlarge

Ciel de Roche, Ardennes, par L. watt-Owen ©, 2009 / click to enlarge

Orage de nuit à Roche, Ardennes, par L. Watt-Owen ©, 2009 / click to enlarge


Le ciel me suffit.
L. W.-O.

vendredi 9 décembre 2011

Les Pentes fabuleuses

Les Phénomènes de la nature par L. Watt-Owen ©, avril 2007

Plusieurs éditeurs m'ont proposé ces dernières années de ressortir  Les Pentes fabuleuses, ce petit livre si ancien, qui avait déjà connu (sous un autre sobriquet)  plusieurs rééditions, depuis la première, en 1990, sous un autre titre. La dernière, en "poche", avait paru en 2003 . 
La récente faillite de l'éditeur est une aubaine : j'en ai récupéré le copyright. Ouf !
Comme il ne se passe pas de semaine, depuis toutes ces années, sans que de nouveaux lecteurs m'en causent, je me chargerai donc moi-même de le rééditer, dans quelques semaines, dans une version corrigée, augmentée et illustrée. On n'est jamais si bien servi que par soi-même. D'autant que, malgré un contrat, l'éditeur verni n'a pas cru devoir me verser un centime de droits sur cet ouvrage qui a tout de même eu un inattendu et bien chouette  petit succès et se classait "top vente" du copieux (et excellent) catalogue. Quand je vois qu'il continue, malgré la cessation d'activité de l'éditeur, à se vendre en neuf sur les librairies en ligne, je voudrais bien savoir dans quelles poches va le fric ! Autant que ce soit, enfin !, dans les miennes. Cette réédition attendra toutefois que, sur les mêmes sujets et dans les mêmes décors, on donne une monstrueuse dinguerie, qui paraîtra en feuilleton sur ce blog dès que j'en aurai assez sous le coude.
L. W.-O.


Ci-dessous, quelques extraits, décousus, des Pentes fabuleuses trouvés sur la Toile

" Beyriat, les années soixante.

À part ma vie furtive dans les arbres, je n'aurai jamais rien aimé autant que les moments magiques où la nuit se convertit en jour et le jour en nuit. Les bonnes aurores. Les soirs bordés d'or. Les deux bouts de la nuit, les deux bouts du jour.

 

Je guettais l'aube en douce au carreau de la chambre ou carrément grimpé sur le parapet de la fenêtre par le grand-père qui revenait spécialement de traire à l'écurie, me réveillait, délicat, et me faisait partager le spectacle incomparable des Alpes qui s'enflammaient, tandis que je buvais à pleines paumes le lait encore fumant tout juste trait dont il me montait un bol, que je croyais puisé à même les pentes brûlantes du Mont-Blanc, je ne regardais pas ce que j'avalais, je fixais la rouge gueule cinémascope des Alpes qui s'ouvrait comme la mienne, j'essayais de ne pas imaginer que le lait avait la même consistance que le sang craché là-bas par ma mère.
 

Je me recouchais un moment, sans me rendormir, avec en oreiller le livre que j'allais bientôt rouvrir dès les pieds sous la table. Je revotais fabuleusement, j'étais bien. Je n'existais pas encore. Je vivais. Tout simplement. Je me sentais vivre.
 

Je dévalais l'escalier d'un coup. Tonnerre des semelles ren­forcées.
 

Le plus clair comme le plus noir du temps, j'allais par du papier quand ce n'était pas par la belle nature, et même, la plupart de ce temps si clair et si noir, j'emportais ce papier par cette nature, c'était chaque matin la promesse d'un beau et bon matin que commençaient de broyer les paroles et les boucans humains, alors dès le réveil c'était vite ! vite ! Mon papier, et souvent, à peine le bol vidé, c'était dare-dare dehors, avec la musette pleine de papier fabuleux, de crayons magiques, de choses secrètes - je possédais même une petite machine à écrire de dans-le-temps, laquée de noir chinois, et une lunette astronomique, autre merveille dénichée à Hongkong, spécialement pour moi, par ma tante cosmopolite.

(…)

Je faisais semblant de lire, assis dans la cuisine. La porte est ouverte au matin comme le livre: je regarde pleuvoir sur le cerisier. Feuilles et fruits laqués. Du vrai vert, du vrai rouge, des éclats d'or. Le tronc, un torse de nègre en sueur élevant à bout de bras une danseuse baroque du carnaval de Rio, la femme-toucan. L'averse crépite sur les tôles et les capots. (Bouts de crayons et babioles dans la boîte remuée. La machine à écrire entendue toute la nuit. Galop d'ongles sur la vitre. Ou le bruit trop fort du feu dans les films.)
 
Le beau matin. Le beau et bon matin. Je suis du matin.
 
Il fait fou.
 
L'orage s'énerve. Ambiance mythologique des vignettes en couleur dans la Géographie : Les Phénomènes de la nature.
 
La femme-toucan a la danse de Saint-Guy, sa robe de plumes vertes se trémousse, se soulève, le nègre transpire mais tient bon. Plus elle danse plus les tambours s'excitent, plus les tambours s'excitent plus elle danse.
 
Toucan... boucan... bouquin (mon Toutankhamon)... eh mon con... tend ton quinquin et tend ton cou !... t'entends pas tout...
 
Je fais mine de lire, ou d'écrire, ou colorier. Je tue le temps dans des histoires qui n'en finissent pas ou dans de la couleur délayée d'ennui, ou par de l'écriture qui va n'importe où, prend toutes les formes, parce que je ne regarde pas vraiment ce que je lis ou trace, je regarde dehors en même temps.
 
Face à moi le fracas du matin, dont la porte de la cuisine, toujours ouverte, cadre la luminosité survoltée. Derrière moi le grondement sourd du feu qui couve dans la cuisinière. 

(…)

La haine de l'ennui, énorme. Le bonheur de la flemme. De quoi je me serais plaint ? C'était les beaux jours ou jamais et je le savais et j'en profitais. Les montagnes fantastiques, les forêts médiévales, la girandole des pentes, les prés, les champs volubiles, les blés, les cailloux, les vaches, le chien, la ferme, l'imprimerie, le tracteur, les tronçonneuses, les machines, les beaux outils, tout ce qu'on bouffe, boit, respire, renifle, aperçoit, ressent, mon bel état d'idiotie bienheureuse, la joie des cerises, des fraises et des patates, et du fromage par goinfrées, les ruisseaux où se tremper le cul, les tropiques dès les foins de juin, les pluies démentielles, le vert fabuleux des printemps, les automnes couleur de pain avec la brume comme de la mie, les neiges de ruée vers l'or, la complicité des bêtes, des légumes et des éléments, les rêves en technicolor, ma vie dans les arbres... les merveilles étaient encore tellement plus nombreuses que les démons. Je ne faisais pas de différence entre lire et regarder autour de moi, je passais insensiblement de l'un à l'autre. En bout de ligne ou de page, mes yeux continuaient dans le décor, je déchiffrais mon Arthur Gordon Pym avec les mêmes yeux que je lisais la montagne gravée de cicatrices, une phrase de cailloux dans la cour, un nuage parmi le vaste ciel, un peu d'eau qui coule entre les herbes, une mécanique qui déconne, la lente mélancolie d'un bestiau, la pluie battant le carreau ou le feu tout juste allumé, encore si incertain et qui profitera de la moindre inattention pour ne plus prendre, je fixais chaque phrase comme l'incandescence rebelle du filament dans l'ampoule qu'on vient d'éteindre. Je lisais en plissant les yeux, comme lorsque je cherchais à ne plus voir que mes cils, quand je faisais semblant d'être mort, en trichant un peu et que, déjà, de peur d'y rester vraiment, les paupières tremblent, le masque du museau se tord en grimace lente, les quinquets piquent et pleurent deux gouttes qui brouillent le ciel à la renverse tandis que couve dans le chatouillis de la gorge l'imminente déflagration d'un rire phénoménal à en souffler les montagnes."

extrait de 
Les Pentes fabuleuses 






mercredi 7 décembre 2011

Autoportrait chinois

 
« Quand vous êtes capable, feignez l’incapacité. 
Quand vous agissez, feignez l’inactivité. 
Quand vous êtes proche, feignez l’éloignement. 
Quand vous êtes loin, feignez la proximité. » 
 
Sun Tse, L'Art de la guerre

mardi 6 décembre 2011

Chauffe Marcel !




"(…) Il y a plusieurs mois que je ne porte plus que des cols roulés. Faites en autant, c’est beaucoup mieux. (…)"

Jacques Lacan, extrait de la 
Lettre inédite de 1969
à Roger Dextre et Jean-Paul Sauzède
publiée dans La Main de singe, numéro 1, 1991

lundi 5 décembre 2011

"Écrivons attendant de plus fermes plaisirs…"

Magnificat, par L. Watt-Owen ©, Marais de Lavours, 2008 / click to enlarge

Mon Dieu, que je voudrais que ma main fût oisive, 
Que ma bouche et mes yeux reprissent leur devoir. 
Écrire est peu : c’est plus de parler et de voir, 
De ces deux œuvres l’une est morte et l’autre vive. 

Quelque beau trait d’amour que notre main écrive,
Ce sont témoins muets qui n’ont pas le pouvoir
Ni le semblable poids, que l’œil pourrait avoir
Et de nos vives voix la vertu plus naïve.
 
Mais quoi : n’étaient encor ces faibles étançons
Et ces fruits mi-rongés dont nous le nourrissons,
L’Amour mourrait de faim et cherrait en ruine :
 
Écrivons attendant de plus fermes plaisirs,
Et si le temps domine encor sur nos désirs,
Faisons que sur le temps la constance domine.

Jean de Sponde

dimanche 4 décembre 2011

"Aucune place pour lui-même…"

Autoportrait par L. Watt-Owen ©, Le Tréport, juillet 2011 / click to enlarge
"Dans tout cela il n’y avait pas la moindre place pour Robert Herrick. Il avait épousé le creux de la vague dans les affaires des hommes, et la vague l’avait emporté au loin ; il entendait déjà mugir le maelström qui devait l’envoyer par le fond. Et dans son âme harcelée et déshonorée, il n’y avait aucune place pour lui-même."

Robert-Louis Stevenson, Le Creux de la vague

vendredi 2 décembre 2011

"la place vide qu'on occupe"




Parce qu'ils m'ont touché, je redonne ici, de façon plus visible, le commentaire de "Roma" à mon précédent billet, ainsi que la vidéo ci-dessus de Nicolas Repac qu'il évoque, et que je découvre à cette occasion. L. W.-O.

le souvenir, au cœur, la trace vive, l'enfance de l'art, sans pensée, des sauts, juste des apparitions, lamelles de miroir, le temps un moment, les volets que cogne le vent, la place vide qu'on occupe

un faible pour Nicolas Repac -
La nuit mène une existence obscure 
Roma