dimanche 22 septembre 2024

FLAUBERT C'EST MOI !

 

 Cartes postales...

L'autre jour, à Croisset, miraculeusement seul dans le fameux Pavillon de Flaubert, j'ai succombé à l'occasion tentante et au culot touristique de m'assoir à SA table, dans SON fauteuil qui me tendait les bras et dont je tapotais le dos comme à un vieux copain enfin visité. Je redoutais les méchants ressorts certainement rouillés sous le vieux cuir couleur de sang, mais anticipant les futurs reproches qu'il se ferait si il n'osait pas tenter le coup, le touriste brava l'interdit du sacrilège et, enhardi, laissa choir son lourd cul de gorille sur le trône du Roi des écrivains. Il se révéla d'un moelleux ! confortable comme un Poltrone Sofa ! Je comprenais enfin pourquoi l'ami Gustave ne le quittait quasi jamais... À cette table légendaire où le Roi des Écrivains écrivit, si lentement, tous ses livres légendaires et, à toute berzingue, ses 100 000 lettres légendaires, je ne pus moi, en une heure, pondre laborieusement qu'un minable hypocrite SMS à un connard et prendre un rendez-vous sur Doctolib. Plus tôt j'avais aussi ouvert tous les tiroirs de la bibliothèque, mystérieusement vidée de tout livre, où ne se trouvaient que des rouleaux de ficelle, du scotch, des punaises, des clous rouillés, un marteau et une vignette Panini de Kylian M'Bappé, et j'y avais fourré un Bic neuf, du papier vierge et une enveloppe timbrée avec mon adresse, on ne sait jamais. À peine avais-je expédié mon SMS, un peu vexé tout de même de n'avoir même pas été capable d'un haiku, j'ai réalisé enfin, avec terreur, que j'étais assis sur les grosses cuisses du fantôme de Flaubert. J'ai bondi comme éjecté par un phénoménal coup de pied où je pense. Des semaines déjà plus tard j'ai encore si mal que je ne peux toujours pas m'assoir sur mon propre trône, de Roi des Cons...

L. W.-O


 


 



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