David Goodis au piano |
Dans les soirées de la jet-set où l'on consentait à l'inviter, le romancier et scénariste américain David Goodis se présentait fagoté dans un méchant costume rose-saumon, où il avait cousu une étiquette de marque volée sur un vrai costume chic. On le traitait avec suffisance et dédain. Il trouva un beau jour l'astuce d'une revanche imparable : s'assoir au piano et marteler le Concerto pour piano N°1 de Chostakovitch. Aussitôt le brouhaha cessait, les invités légendaires se rassemblaient autour de lui pour entendre le morceau de bravoure. La virtuosité de ce pauvre type éberluait tout le monde. Mais après quelques mesures, il cessait brusquement de jouer et se levait en claquant violemment le couvercle sur le clavier. On le suppliait de s'y remettre mais il se refusait à jouer plus longtemps sur un tel tracassin, il n'avait plus envie de jouer. Imperturbable, l'auteur de Tirez sur le pianiste tenait bon. Il aurait été bien en peine de poursuivre. Il ne savait jouer au piano que ces quelques mesures, pas une de plus, de cette pièce virtuose. Il les avait apprises d'oreille, note après note, et répétées jusqu'à les singer avec un brio plausible.
L. W.-O.
Lien : http://www.davidgoodis.com/
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire